Pour nous décrire, il nous paraît plus juste de partir de ce que nous ne sommes pas.
La Divine Comédie n'est pas un collectif. Il y a des collaborations récurrentes, mais les distributions changent, faites d'artistes de générations, de disciplines, de cultures, de pays, différents. A chaque fois on réapprend à collaborer, et ce qui fait "collectif", c'est la place laissée aux artistes pour imprimer le spectacle de l’hétérogénéité de leurs idées, de leurs visions, de leurs personnalités. Nous nous rendons ainsi plus imprévisibles à nous-mêmes que si nous étions rompus à notre groupe. C’est un garde fou contre l’homogénéité sociologique et esthétique qui pourrait isoler l'art de la société, et les artistes du public. Cela nous prive-t-il d'une « patte » identifiable ? Tant pis, tant mieux : qu’il soit réussi ou raté, nous ne referons jamais deux fois le même spectacle.
Notons du moins deux permanences : la musique écrite puis jouée au plateau, et un rapport exigeant et passionné au texte.
La Divine Comédie ne fait pas d'écriture au plateau. Quelqu'un a écrit d'abord le texte, qui n'est pas là pour répondre à nos questions. Son absence nous permet de faire un long chemin vers son univers profond, pour tenter d'en ramener et d’en donner le plus immédiatement possible, sur le temps court du spectacle, toute l'émotion, toute la sève, toute la clarté, toute l'obscurité, toute la contradiction, tout le formulé et l'informulé que nous avons découverts. Quand on vous ouvre le corps pour vous opérer, on ne vous demande pas de participer.
Nous espérons ne pas faire un théâtre élitiste. Nous gageons que le public le plus large est reconnaissant d'être invité à cette polysémie, cette complexité, cet informulé, grâce à quoi on peut, dans un même mouvement, faire écho aux questions sociétales contemporaines, et nourrir la vie intime, entrer en sympathie avec la complexité, l'informulé, l'irrésolu de chacun. Notre travail d'action artistique est un endroit privilégié de dialogue permanent avec le public, qui nourrit nos créations, jusqu'à faire fusionner parfois création et action artistique en des projets accaparant la compagnie sur plusieurs années, comme La Princesse Maleine en Chine en 2011, ou L'Invention de Morel aujourd'hui.